Intervention de Roger Lahana devant le Conseil Constitutionnel de l’Equateur, 17/12/20

Le Conseil Constitutionnel équatorien s’est réuni à Quito le 17 décembre 2020 à la suite d’un recours en inconstitutionnalité déposé par un lobby taurin local en vue d’invalider le vote pour l’abolition des corridas obtenu lors d’une consultation populaire en 2011 mais jamais appliqué depuis. L’audience s’est déroulée par Zoom en raison de la pandémie. Elle a rassemblé 65 participants, dont les cinq juges constitutionnels (parmi lesquels trois femmes), venus plaider pour ou contre la validité du vote de 2011. Dans ce cadre, Roger Lahana, en tant qu’Amicus Curiae, a présenté en espagnol un document juridique formel en appui des arguments abolitionnistes. Le but de cette intervention était de démontrer deux mensonges éhontés des procorrida dans leur mémoire au sujet de la France. Ils prétendaient en effet – à tort – que dans notre pays la tauromachie est toujours au Patrimoine Culturel Immatériel et que les corridas sont protégées par la Constitution française. Sur ce dernier point, Roger Lahana a repris les principaux éléments du texte d’un autre Amicus, rédigé par un avocat équatorien résident en France, Maître Diego Arias, qui n’a pas pu participer aux débats pour des raisons de procédure. L’intégralité de son texte traduit en français va figurer prochainement sur notre site. Voici la traduction en français de l’intervention de Roger Lahana, suivie du texte original en espagnol.

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Nous demandons à la Cour constitutionnelle de rejeter l’action en inconstitutionnalité qui vise à autoriser les corridas.

Je suis Roger Lahana, citoyen français, domicilié en France, membre de la FLAC – Fédération des luttes pour l’abolition des corridas – et président de l’association No Corrida. Je me présente en tant que amicus curiae, dans les termes suivants :

La FLAC est une fédération qui regroupe seize associations et plus de deux cent mille membres en France. Elle œuvre pour l’abolition des corridas et bénéficie du soutien de nombreuses personnalités, dont des ministres, des députés, des sénateurs, des maires et des conseillers municipaux français.

Je présente cet Amicus dans le but de réfuter l’affirmation selon laquelle la tauromachie est actuellement reconnue comme patrimoine culturel immatériel de la France, et aussi de nier que la tauromachie est constitutionnelle en France, et de relever les moyens malhonnêtes mis en oeuvre, en vain, par le collectif taurin comme cela lui est coutumier.

Le 1er juin 2015, la tauromachie a été rayée du patrimoine culturel immatériel (PCI) de la France par la Cour administrative d’appel de Paris. L’inscription à l’inventaire du PCI a été effectuée dans le plus grand secret par un assistant du ministre de la Culture, également membre fondateur de l’ONCT, un lobby taurin français (Observatoire national des cultures taurines). Le ministre ne l’a appris que plus tard. Suite à cette initiative, ce classement a servi de prétexte à toutes sortes de fraudes fiscales de la part de certains organisateurs de corridas. Face à l’indignation exprimée par de nombreux Français auprès du ministère lorsque l’ONCT a annoncé la nouvelle, le cabinet du ministre a fait retirer toutes les mentions de cette inscription de son site Internet et de ses fichiers officiels. Le dossier n’a jamais réapparu jusqu’à la procédure engagée devant le tribunal administratif de Paris en l’an 2015.

Le tribunal a conclu que « la décision d’inclure la tauromachie dans l’inventaire du patrimoine culturel immatériel de la France doit être considérée comme abrogée ». La tauromachie est depuis officiellement retirée du patrimoine français.

L’ONCT et l’Union des Villes Taurines de France ont saisi en appel le Conseil d’Etat. Sa décision a été annoncée le 27 juillet 2016. L’appel a été rejeté, confirmant ainsi clairement et incontestablement l’exclusion de la corrida du patrimoine culturel français.

Prétendre que le Conseil constitutionnel français peut déclarer une pratique comme étant constitutionnelle est faux. Le Conseil constitutionnel ne procède qu’à un examen de la constitutionnalité des normes sans entrer dans la constitutionnalité des pratiques. Il s’est seulement prononcé sur la constitutionnalité de définir une partie de la France comme bénéficiaire d’une exception à la loi sur un unique critère géographique.

Il n’affirme en aucun cas que la tauromachie est constitutionnelle et il ne modifie en rien l’article de loi du Code Pénal qui définit les corridas comme relevant de « sévices graves ou des actes de cruauté envers un animal ».

La corrida est une infraction pénale, sanctionnée par la loi, à l’exception de 10% du territoire où elle bénéficie d’une immunité de peines, ce qui n’enlève rien au fait qu’elle est un délit.

Pour ce qui précède, je demande que mon Amicus soit pris en compte lors de la résolution de cette action en inconstitutionnalité qui menace le bien-être des taureaux.

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Texte original en espagnol :

Pedimos a la Corte constitucional que deseche la accion de inconstitucionalidad que busca permitir las corridas de toros.

Yo soy Roger Lahana, ciudadano francés, domiciliado en Francia; parte del Colectivo FLAC – Fédéracion des Luttas por la Abolicion des Corridas – y presidente de la ONG No Corrida. Comparezco con el presente amicus curiae, en los siguientes términos:

FLAC es un colectivo que reúne a dieciséis asociaciones y más de doscientos mil miembros en Francia. Trabaja por la abolición de la tauromaquia y que cuenta con el apoyo de numerosas personalidades, entre ellas ministros, diputados, senadores, alcaldes y concejales municipales franceses.

El presente Amicus lo presento con la finalidad de desmentir la afirmación de que la Tauromaquia sea actualmente reconocida como Patrimonio Cultural Inmaterial de Francia, y tambien de desmentir que la tauromaquia es constitucional, y relatar los medios irregulares que el colectivo taurino utilizó para intentar, fallidamente, que lo fuese.

El primero de junio de 2015, la tauromaquia fue eliminada del Patrimonio Cultural Inmaterial de Francia por el Tribunal Administrativo de Apelación de París. La inclusión en el inventario del patrimonio cultural inmaterial se llevó a cabo en total secreto por un asistente del Ministro de Cultura, quien también fue miembro fundador de la ONCT, un lobby taurino francés (Observatoria nacional de culturas taurinas). El ministro no se enteró hasta más tarde. Desde entonces, esta clasificación ha servido de pretexto para todo tipo de evasión fiscal por parte de algunos organizadores de corridas de toros. Ante la indignación expresada por muchos ciudadanos franceses al ministerio cuando la ONCT anunció la noticia, la oficina del ministro hizo que se eliminaran todas las menciones de esta lista de su sitio web y archivos oficiales. El expediente nunca reapareció hasta el trámite iniciado ante el Tribunal administrativo de París en el año dos mil quince.

La corte concluyó que « La decisión de incluir las corridas de toros en el inventario del Patrimonio Cultural Inmaterial de Francia debe considerarse como derogada ». La tauromaquia está oficialmente retirada del patrimonio francés.

Como resultado, la ONCT y la Union des Villes Taurines de France recurrieron al Consejo de Estado. La decisión se dio a conocer el 27 de julio de 2016. El recurso fue desestimado, confirmando así de forma clara e indiscutible la exclusión de la corrida de toros del Patrimonio Cultural de Francia.

Afirmar que el Consejo Constitucional francés declara une practica constitucional es falso. El Consejo Constitucional realiza unicamente un examen de constitucionalidad de la norma sin adentrarse en la constitucionalidad de la practica. Solo se promuncia sobre la constitucionalidad de definir que parte de la Francia podria beneficiarse de une exception a la ley sobre un unico criterio geografico.

No afirmo en modo alguno que la tauromaquia fuera constitucional y no modifico nada a la ley del Codigo penal que le define como « abusos graves y actos de crueldad hacia los animales”. La tauromaquia es una infraccion penal, sancionada por la ley, con la exception del diez por ciento del territorio donde goza de inmunidad, pero sigue siendo un criment.

Por lo expuesto, solicito que mi Amicus sea tomado en cuenta al momento de resolver esta acción de inconstitucionalidad que atenta contra el bienestar animal de los toros.

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Vidéo de l’intervention de Roger Lahana sur la chaîne officielle de la Cour constitutionnelle de l’Equateur (à partir de 32’25 ») https://www.youtube.com/watch?v=pp6K1BoFwTs

Egalement sur la chaîne de la FLAC : https://www.youtube.com/watch?v=k2G57wYrPEM