Arles, ville pauvre, pauvre ville

Arles, comme de nombreuses villes taurines, est plus endettée que la moyenne des autres villes comparables. Depuis peu seulement, elle n’est plus sous tutelle. Arles est une ville pauvre, malgré les taxes foncières et d’habitation les plus élevées du secteur. Pas de création d’emplois – les jeunes et moins jeunes doivent aller chercher ailleurs, certains jusqu’à Marseille ou Montpellier. Parfois, ils quittent leur ville, fatigués de tant de distance à faire quotidiennement. Les boutiques et magasins ferment les uns derrière les autres. Arles ne survit que grâce au tourisme et aux « vieilles pierres » gallo-romaines.

Arles est sale, mal entretenue, mal gérée. Arles est vendue aux plus offrants comme M. Hoffmann. Il y a beaucoup à faire, construire, créer pour la ville et les habitants – ce qu’ont fait des communes limitrophes. C’est pourquoi, certains croyant au changement ont voulu élire un maire qui n’avait jamais été un politique dans cette ville. Il promettait non pas « le grand soir » , mais « un grand plan de relance économique : rendre attractive la ville pour retenir les chefs d’entreprise et attirer les investisseurs, rompre avec un désert médical, mettre en place tout un cercle vertueux pour dynamiser la cité romaine« .

Mais, en pleine crise sanitaire, crise agricole, crise économique pour les commerçants, hôteliers et restaurateurs, le projet qui motive ce maire cinq mois à peine après son élection, c’est dépenser le peu d’argent que la ville possède en créant un « Toropôle ».

Les élus d’opposition sont d’accord sur le fond. Tous aficionados ? C’est à craindre. Mais pas d’accord sur la somme demandée à la région, pour l’étude.

M. Rafaï (PS) pointe  » l’absence de concertation avec les acteurs locaux, l’existence de structures comme la maison du cheval Camargue, la maison des produits du terroir« . D’ailleurs, durant la campagne, il m’avait affirmé que la corrida apportait beaucoup d’argent à la ville. Je m’étais permis de le contredire, précisant que ce n’était pas la corrida mais la feria qui faisait vivre la ville. En fin de séance de ce conseil, il a rendu « hommage à l’ancien adjoint communiste à la tauromachie J-M. Egidio et au socialiste, ancien torero, manadier et directeur des arènes L. Jalabert« . Voilà qui est clair.

Quant à N. Koukas (PC), il s’étonne simplement qu’on sollicite la Région pour l’étude d’un projet à 2,5M€. Enfin, C. Girard (Changeons d’Avenir) : « Que ne pourrait-on faire au Parc avec autant d’argent ? La Région a travaillé pour saccager des outils existants, elle arrive maintenant en sauveur. Mais non, la ruralité ne peut pas se réduire à une vision folklorique et étriquée.« 

Mais Patrick de Carolis est un aficionado jusqu’au bout des ongles. L’important, ce n’est pas Arles et ses habitants, c’est la corrida, alors que la région PACA est la deuxième la plus touchée par la pandémie en France. « Avec 21 % de morts supplémentaires (toutes causes confondues) entre le 1er septembre et le 16 novembre 2020 par rapport à la même période en 2019, la deuxième vague de Covid-19 a indéniablement plus lourdement touché la région que la première » selon La Provence. Les 3/4 de sa liste sont mêlés de près ou de loin à la tauromachie. C’est d’ailleurs uniquement pour cela qu’il venait régulièrement dans « sa » ville, durant toute sa carrière où il habitait Paris.

« Moi j’ai envie de faire naître ce musée de la tauromachie. C’est en tête de Camargue et ça rayonnera sur le territoire« .

Soyons clairs, c’est uniquement la tauromachie espagnole qui le passionne. Pour faire passer son projet, il y a ajouté plusieurs autres thématiques : musée taurin et espace librairie sur les différentes tauromachies (la Camarguaise, il n’en jamais eu que faire), mise en valeur des filières agricoles locales, équipements pour les écoles taurines, équipements pour l’accueil de manifestations équestres et la découverte du cheval Camargue, ainsi qu’un espace de vie convivial avec un bar à tapas – propulsées pour l’occasion au rang de spécialité culinaire camarguaise – offrant des animations régulières et étant un lieu de partage autour des tauromachies.

Arles n’est pas près de sortir des pratiques sombres et cruelles d’un âge révolu, rejeté par les trois-quarts des Français… mais pas dans cette pauvre ville.

Dominique Arizmendi