France Info nous a appris que depuis le 23 janvier dernier, le nouveau conseiller Culture de l’Élysée répond au nom de Philippe Bélaval.
À la tête du Centre des monuments nationaux pendant presque dix ans, de nombreux médias ont dressé un bilan dithyrambique de cette période. Beaucoup moins ont souligné ses initiatives catastrophiques qui ont débouché sur la dégradation des murs de la cité de Carcassonne ou la destruction d’arbres centenaires des étangs de la ville d’Avray, assurant l’invasion de roseaux et de vase de cet étang remarquable.
Et hormis France Info, pas un n’a évoqué ses manœuvres sournoises, voilà maintenant plus de dix ans, pour tenter d’assurer une promotion sans commune mesure de la barbarie des arènes.
Car Philippe Bélaval est un grand amateur de torture tauromachique, membre fondateur de l’Office national des cultures taurines, à la tête de laquelle nous trouvons aujourd’hui encore l’incarnation même de l’inculture qu’est ce fameux André Viard, jamais avare d’un délire pseudo-intellectuel dès que l’occasion se présente.
En 2011, Philippe Bélaval occupait le poste de Directeur général des Patrimoines, rattaché au ministère de la Culture. Par l’entremise d’une commission occulte, il avait réussi à faire inscrire la corrida au patrimoine culturel immatériel de la France. Sans qu’à aucun moment le ministre de la Culture de l’époque, Frédéric Mitterrand, n’en soit averti. Ce dernier s’en est aperçu lorsque, au cours des déplacements réalisés dans le cadre de ses fonctions, il était systématiquement interpelé par des militants anti-torture qui le questionnaient sur la raison d’une telle promotion d’une pratique rejetée à l’époque par les trois-quarts des Français (proportion en augmentation depuis).
Frédéric Mitterrand avait rapporté cet épisode au sein de La récréation, l’ouvrage qu’il avait écrit à la suite de son expérience ministérielle : « Stupéfaction ! Une obscure commission du ministère dont je ne soupçonnais même pas l’existence vient d’inscrire la tauromachie au patrimoine immatériel de la France, au même titre que les chants de bergers basques ou la tarte Tatin. Mais la tauromachie n’est pas une tradition innocente et j’imagine le forcing auquel ont dû se livrer une poignée de fonctionnaires à consigner cette inscription.[…] C’est une faute de lui attribuer ce genre de label officiel qui laisse croire en plus qu’elle pourrait monter encore d’un échelon et être proposée au patrimoine de l’UNESCO. »
Suite à un rassemblement symbolique au pied du Louvre pour dénoncer cette inscription, deux associations (Droit des animaux et le Crac Europe pour la protection de l’enfance) avaient saisi le tribunal administratif de Paris afin d’obtenir l’annulation de cette inscription en catimini.
Déboutées en première instance, elles avaient fait appel. En 2015, la Cour administrative d’appel de Paris s’emparait du sujet, et c’est là que ça devient comique. La Cour avait indiqué qu’elle ne pouvait donner une suite favorable à la demande des associations… car il fallait considérer que l’inscription de la corrida au patrimoine culturel immatériel national était d’ores et déjà abrogée. En effet, devant le tollé général suscité par cette inscription opaque de la torturomachie, le ministère de la Culture avait fait disparaître de son site officiel toute mention à celle-ci. Ce qui, aux yeux de la Cour d’appel, représentait une décision de désinscription.
L’ONCT, via notre cher André Viard, se pourvut en cassation, mais rien n’y fit : en 2016, le Conseil d’État enterrait définitivement tout espoir d’inscription. Ce qui n’empêche pas, encore aujourd’hui, André Viard de fantasmer cette inscription et de mentir en permanence, tantôt invoquant une inscription au patrimoine national, tantôt carrément une inscription au patrimoine de l’Unesco.
Suite à cette jurisprudence, il est on ne peut plus clair que Philippe Bélaval ne pourra jamais tenter de remettre le couvert sur ce sujet.
Pour autant, il est plus qu’inquiétant qu’un pays comme la France se dote d’un conseiller culture de l’Élysée qui a démontré qu’il était prêt à contourner son ministre de tutelle pour assurer la promotion d’un plaisir pervers personnel.
Et il ne fait aucun doute que ce sinistre personnage saura murmurer à l’oreille d’Emmanuel Macron afin de s’assurer qu’aucun projet de loi ayant pour but d’abolir les sévices graves et actes de cruauté qui se tiennent au sein des arènes du sud de la France puisse voir le jour au sein de la majorité présidentielle.
Un Emmanuel Macron qui, en se prosternant systématiquement devant Willy Schraen, le patron de la fédération national de chasse, ou en délivrant la Légion d’honneur à Christiane Lambert, la présidente du syndicat agricole des pesticides et des élevages concentrationnaires qu’est la FNSEA, a démontré qu’il était un représentant modèle du vieux monde politique hors-sol tout dévoué aux lobbies.
David Joly
Trésorier FLAC et No Corrida