A Béziers, comme dans la plupart des villes taurines, la tauromachie pourrait bien mourir de ses difficultés financières – Un article du Colbac.
Le statut des arènes
Les arènes de Béziers sont la propriété privée d’une poignée d’actionnaires groupés en société anonyme. Ces actionnaires, au lieu d’exploiter eux-mêmes leur bâtiment, préfèrent le louer à la mairie qui y monte chaque année un petit nombre de spectacles et de concerts. Depuis de nombreuses années, la mairie a cessé d’organiser elle-même des corridas. Elle confie cette tâche à un professionnel, un spécialiste des spectacles taurins – Robert Margé – à qui elle sous-loue les arènes.
Les corridas de la feria biterroise sont donc des spectacles privés, organisés par un entrepreneur privé dans un bâtiment privé. Dans ces conditions, la tauromachie, comme toute entreprise privée, ne peut subsister que si elle est financièrement rentable. Or, Robert Margé est confronté à de très graves difficultés financières.
Moins de spectateurs
A Béziers, comme dans toutes les villes taurines, le nombre des spectateurs de corridas décline sans cesse depuis quelques années, avec parfois de véritables effondrements. Ainsi, en 2016, le nombre des entrées a chuté de 25% par rapport à 2015. Robert Margé et les clubs taurins ne cachent pas leur inquiétude pour l’avenir de la tauromachie.
Loyer des arènes en forte hausse
En décembre 2014, la mairie a renouvelé pour six ans le bail par lequel elle sous-loue les arènes à Robert Margé. Le loyer annuel que la mairie, dans ce nouveau bail, impose au locataire a plus que doublé, passant de 28.500 à 60.000 euros.
Dette fiscale
Les spectacles dits « vivants » (théâtre, etc.) bénéficient d’un taux de TVA réduit : 5,5 % au lieu de 20% . Les organisateurs de spectacles taurins estiment que la corrida est un spectacle vivant et revendiquent – en vain – une TVA minorée. Pour faire pression sur le fisc, Robert Margé entre 2011 et 2014 n’a accepté de payer la TVA qu’au taux de 5,5 %.
Le conflit a été porté au tribunal administratif. Celui-ci, en décembre 2014, a condamné Robert Margé à payer la TVA à taux plein et donc à régler sa dette au fisc, soit environ 200.000 euros par an pour la période 2011-2014 (pour les chiffres exacts, cliquer ici).
Le bilan déficitaire des corridas biterroises
Contrairement à ce que croient beaucoup de gens mal informés, la corrida n’est pas un spectacle rentable. Sa rentabilité s’est encore dégradée ces dernières années en France et en Espagne en raison du recul général du nombre de spectateurs. D’autre part, la crise financière mondiale née en 2007-2008 et la politique d’austérité imposée en France et en Espagne ont réduit ou supprimé les subventions publiques que la tauromachie recevait auparavant.
Non seulement les corridas biterroises ne produisent plus aucun bénéfice, mais leur bilan est devenu déficitaire. En 2016, ce déficit a frôlé un demi-million d’euros. Une situation qui ne peut durer…
Vers le dépôt de bilan ?
Robert Margé a demandé et obtenu en septembre 2017 que le tribunal de commerce place sa société en procédure de sauvegarde. C’est l’ultime stade avant la faillite. Une faillite qui aurait probablement déjà eu lieu si l’organisation de spectacles taurins était une entreprise comme une autre.
Mais ce qu’il faut bien appeler la toromafia dispose de nombreux appuis dans tous les milieux décisifs. C’est sans doute pourquoi le tribunal de commerce a accepté la procédure de sauvegarde, laissant ainsi à Margé une ultime chance de redresser ses comptes.
Ultimes expédients
Menacé de couler à pic, Robert Margé s’agrippe à deux bouées de sauvetage : il réduit la dimension de la feria 2018 et s’est associé à Simon Casas.
La prochaine feria biterroise, au lieu d’offrir, comme d’habitude, cinq corridas, n’en comportera que trois. A la place des corridas supprimées sont prévus deux spectacles moins onéreux mais aussi moins attractifs : une course équestre et un spectacle taurin sans mise à mort.
Simon Casas est l’organisateur de corridas le plus puissant de la planète. Il dirige un grand nombre d’arènes dont Nîmes et Madrid, qui sont respectivement la capitale française et la capitale mondiale de la corrida. Quand il achète des taureaux, quand il embauche des matadors, c’est pour plusieurs arènes à la fois. Sur le marché taurin, Margé n’est qu’un petit épicier alors que Casas est un grossiste, capable de casser les prix auxquels il acquiert taureaux et toreros. En s’associant à ce puissant grossiste, en constituant avec lui une grosse centrale d’achat, Margé espère obtenir bétail et toreros à moindre prix.
Ces deux expédients suffiront-ils pour éviter la faillite menaçante ?
Nous le saurons bientôt…
Article du Colbac (Comité de Liaison Biterrois Anti Corrida), reproduit avec son aimable autorisation.
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