Ferias oui, corridas non

Ce que veut dire ce slogan utilisé par de nombreux mouvements anticorrida, c’est qu’il n’y a pas lieu de confondre les ferias au sens général du terme, c’est-à-dire les fêtes locales, et les corridas qui n’en sont qu’une partie dans les communes de sang. Toutes les communes de France organisent des fêtes en plein air au moins une fois par an et parfois plus. Celles où se tiennent des corridas appellent souvent leurs fêtes des ferias parce qu’elles utilisent le plus possible de mots espagnols pour faire plus exotique – feria pour fête (le mot signifie en réalité « foire »), bodega pour bar, etc. – et que, surtout, elles veulent délibérément entretenir une confusion dans l’esprit des gens, et surtout des touristes, entre la partie purement festive (la feria) et la tenue de corridas, qui ne sont que l’une des « attractions » de ces ferias où très peu de gens vont, la plupart préférant festoyer dans les rues. Les aficionados vont parler de « feria » pour désigner la corrida afin de faire croire que si la corrida est interdite, alors il n’y aura plus de fête, ce qui est totalement faux.

Par exemple, la feria de Nîmes attire jusqu’à un million de personnes, dont 98% ne mettent jamais les pieds dans les arènes. La partie feria proprement dite de la métropole gardoise ne propose que des activités festives sans lien avec les animaux : bars, restauration de rue, musiciens allant des fanfares aux groupes de rock nationaux ou internationaux, sonos diffusant devant les bars de la musique enregistrée pour faire danser les gens, etc. C’est bien entendu cette partie-là de la feria qui est bénéficiaire, les corridas étant elles quasiment toujours déficitaires. La situation est similaire à Bayonne, Mont-de-Marsan, etc.

Rappelez-vous d’une évidence : si ces centaines de milliers de personnes sont dans les rues à faire la fête pendant qu’une corrida se déroule, c’est qu’elles ne sont pas dans l’arène en train d’y assister.

Les ferias n’ont aucun besoin de corridas pour exister, c’est l’inverse. Dans les villes non tauromachiques, les ferias s’appellent tout simplement des fêtes et proposent exactement le même type de distractions pour faire la fête dans les rues, pendant parfois plusieurs jours.

Il n’y a évidemment aucune raison, en tant que mouvement anticorrida, de s’opposer à ce type de festivités et c’est ce que veut dire le slogan « Ferias oui, corridas non ». Il s’adresse aux 98% de personnes qui aiment venir participer à des fêtes annuelles dans les villes tauromachiques sans pour autant avoir la moindre envie d’aller y voir des corridas. Nous tenons à ce qu’ils comprennent que nous ne nous opposons qu’à la partie qui ne les intéresse pas et que nous n’avons rien contre ce qui attire l’immense majorité d’entre eux : la fête.

Roger Lahana